Biographie
Nguyen Thien DAO est né à Hanoï, Vietnam, en 1940.
Il arrive en France en 1953 et entre en 1963 au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris. Sa rencontre décisive avec Olivier Messiaen en 1967, dans la classe duquel il obtiendra le premier prix de composition, l’amène à découvrir la voie qui sera la sienne. Tout d’abord nourri des images de son enfance et de ses longues méditations devant la nature, hanté par des " polyphonies célestes et totalement imaginaires ", puis, imprégné de poésie vietnamienne et chinoise, il se définit comme " l’héritier des deux civilisations orientale et occidentale ". Il essaye d’en opérer une synthèse, en construisant une musique basée sur les micro-intervalles, les timbres-couleurs, une structure rythmique et un temps-durée particuliers ". Il se voudrait être le créateur d’une " musique de lyrisme, de passion et de caractère épique ", constamment soucieux d’ " exigence d’écriture et de forme ".
En 1969, il est révélé au Festival de Royan avec Tuyn Lua, pour ensemble. Son oeuvre pour grand orchestre Koskom est créée à Radio France en 1971 et en 1972, Ba Me Vietnam, pour contrebasse et vingt instruments, au Festival de La Rochelle. Il reçoit en 1974 le Prix Olivier Messiaen de composition (Fondation Erasme de Hollande). En 1978, son opéra My Châu-Trong Thuy est créé à l’Opéra de Paris (Salle Favart). En 1984, il reçoit le Prix André Caplet (Académie des Beaux-Arts) et son Concerto pour piano et orchestre est créé aux Rencontres de Metz. 1989 voit la création de deux oeuvres : sa Symphonie pour pouvoir par l’Orchestre National de France au Théâtre des Champs Elysées et son Concerto 1789 (pour sextuor à cordes et orchestre), par l’Orchestre National de Lille au Palais des Congrès de Lille. En 1994, son opéra-oratorio Les enfants d’Izieu est créé au Festival d’Avignon. En 1995 et 1997, deux oeuvres dirigées par le compositeur lui-même, à la tête de l’Orchestre National du Vietnam, sont créées à l’Opéra de Hanoî : respectivement Hoa Tâu 1995 et Khai Nhac dans le cadre de la soirée de gala du VIIème Sommet de la Francophonie. En 1998, a lieu la création de Giao-Hoa Sinfonia, Salle Olivier Messiaen à Radio France. L’année 2000 voit la création de Song Hon à l’Opéra de Hanoî, Vietnam, par l’Orchestre Symphonique de Hanoî, dirigé par le compositeur et celle de Arco Vivo, pour violoncelle solo. Pour saluer le XXIème siècle, la création de son oeuvre Kosmofonia (pour grand orchestre et choeur) est créé en 2001 à Forbach. 2002 et 2003 voient les créations de Song Nhat Nguyen et de Song Nhac Truong Chi à l’Opéra de Hanoî, Vietnam, orchestres symphoniques placés sous la direction du compositeur. 2004, création de l’opéra de chambre Quatre Lyriques de ciel et de terre à Paris. 2006, création de Suoi Lung May au 1er Festival de Musique International à Hué (Vietnam). 2007, création de Khoi Thap et So Day à l’Opéra de Hanoï, sous la direction du compositeur. 2008, création de Duo Vivo en hommage à Olivier Messiaen, au Théâtre des Bouffes du Nord.
Distinctions :
Chevalier des Arts et des Lettres ( France )
Médaille de la Culture ( Vietnam )
Médaille de la Resistance (Vietnam )
Ce qu’ils ont écrit...Petit Larousse (Edition 1982) :
DAO (Nguyen Thien Dao, dit) Compositeur vietnamien, né à Hanoi en 1940. Il est influencé à la fois par Messiaen, la musique électroacoustique et la tradition orientale (Ecouter-Mourir, 1980).
Le Petit Robert (Edition 1995) :
DAO (Nguyen Thien Dao, dit) Compositeur français d’origine vietnamienne (Hanoi, 1940). Elève de Messiaen, héritier de deux civilisations, il a écrit notamment KOSKOM pour grand orchestre (1971), les opéras MY-CHAU TRONG-THUY (Paris, 1978) et ECOUTER-MOURIR (Avignon 1980) ainsi que SYMPHONIE POUR POUVOIR, commande de Radio France pour le bicentenaire de la Révolution (1989).
Musique et couleur d’Olivier Messiaen
Edition Belfond
" Je considère Dao comme un compositeur extraordinaire, et le jour où j’ai entendu son Koskom, j’ai pensé qu’il s’agissait vraiment d’une des grandes oeuvres du siècle . C’est une partition énorme, excessivement travaillée, dont le titre signifie " communauté cosmique ". C’est le rêve de Dao, musicien vietnamien fixé à Paris : une " communauté cosmique ", une fraternité qui ressemble non seulement les hommes mais aussi les extra-terrestres. Koskom, c’est l’explosion de la fraternité des ondes, un formidable bouillonnement de sonorités totalement original, avec l’utilisation de notes non tempérées -quarts, tiers et même sixièmes de ton- et l’écho des " portamentos " que Dao a puisés dans la technique vocale vietnamienne traditionnelle. La musique de Dao est l’exemple frappant des contrastes dynamiques : des pianissimos imperceptibles alternent avec des fortissimos écrasants (aussi terribles que ceux de Xenakis). C’est une musique qui évolue surtout, dans le sous-grave et dan le suraigu, souvent dans les deux à la fois.
Lettre à Rolf Liebermann
17 février 1978
Mon cher Maître et Ami,
Ce petit mot au sujet de Nguyen Thien DAO. J’ai appris qu’il était question de monter un opéra de sa composition au nouvel Opéra-studio (Opéra Comique). Je m’en réjouis, et vous en félicite ! Sans doute savez-vous déjà que DAO a eu autrefois un premier prix dans ma classe de composition au conservatoire, qu’il a encore eu un premier prix au " concours Messiaen " (organisé par le Prix Erasme d’Amsterdam) : mais ce n’est pas assez. Il faut que vous sachiez aussi que je tiens DAO pour un très grand musicien, un des compositeurs les plus originaux de notre époque ! Il y a quelques années, j’ai entendu son Koskom (communauté cosmique) pour grand orchestre : j’en ai été bouleversé. Et tout ce qu’il a écrit depuis n’a fait que confirmer ce premier émerveillement...
Croyez, je vous prie, mon cher Maître et Ami, à tous mes sentiments bien affectueux et toujours profondément dévoués.
Olivier Messiaen
Permanences d’Olivier Messiaen de Claude Samuel
Editions Actes Sud
Quelques années après Paul Méfano, Olivier Messiaen accepta dans sa classe un jeune Vietnamien qui venait pratiquement de débarquer à Paris. Avec, pour tout bagage, une bonne formation musicale et un tempérament ardent. Alors que j’élaborais le programme du Festival de Royan 1969, Messiaen me parla de ce Vietnamien au nom compliqué -Nguyên Thien Dao- avec tant de conviction que je mis d’emblée sur pied commande et création mondiale. L’oeuvre s’intitulait Tuyen Lua et reçut un tel accueil qui, hissé sur la scène, Dao l’inconnu, Dao révélé à la musique d’aujourd’hui par Olivier Messiaen, ne put retenir ses larmes. Ce fut le début d’une étrange carrière : Dao, trop original pour intéresser les milieux académiques ; Dao, trop instinctivement lyrique pour capter l’attention de la famille boulézienne et post-sérielle. Mais si Dao put compter sur un soutien inébranlable, ce fut celui de Messiaen, qui rencontrait là un compositeur selon son coeur : résistant à la pression des systèmes d’écriture préfabriqués, capable de faire alterner d’imperceptibles pianissimi avec de tumultueux déchaînements, et détenteur, en outre, d’une authentique tradition orientale.
Je suis un peu triste que Messiaen soit mort trop tôt pour découvrir les Enfants d’Izieu, un saisissant opéra-oratorio que Dao composa en 1994 dans le souvenir de ces enfants juifs emmenés par les Allemands cinquante ans auparavant et exterminés dans une chambre à gaz. Messiaen aurait été touché par le propos, et par ma musique.